COURS D'ALGÈBRE (ET GÉOMÉTRIE) ENSEMBLISTE



COURS SUR ALGÉBRE ENSEMBLISTE

1. Algébre et géométrie corporelle

1.2. Groupes cycliques

1.2.1. Groupes des racines de l'unité

1.3. Groupes de transformations

1.3.1. Groupe linéaire

1.3.2. Groupe des transformations affines

1.3.3. Groupe spécial linéaire

1.3.4. Groupe orthogonal

1.3.5. Groupe spécial orthogonal

1.3.6. Groupe cercle

1.3.7. Groupe unitaire

1.3.8. Groupe spécial unitaire

1.3.9. Groupe spécial linéaire

1.4. Groupes de symétries

1.4.1. Groupe diédral

1.4.2. Orbite et stabilisateur

1.5. Groupes des permutations

1.5.1. Groupe alterné

Nous allons aborder sur ce site l'étude des structures ensemblistes de manière très pragmatique (puisque rappelons que ce site est dédié aux ingénieurs). Ainsi, il sera fait usage du minimum de formalisme et seulement les démonstrations des éléments que nous considérons comme absolument essentiels à l'ingénieur seront présentées. Par ailleurs, de nombreuses démonstrations seront faites par l'exemple et nous nous focaliserons en grande partie sur la théorie algébrique des groupes car elle a une place prédominant en physique plus que pour les autres structures ensembliste.

ALGÉBRE ET GÉOMéTRIE CORPORELLE

Les symétries des figures géométriques, des cristaux et de tous les autres objets de la physique macroscopique font l'objet depuis des siècles d'observations et d'études. En termes modernes, les symétries d'un objet donné forment un groupe.

Depuis le milieu du 19ème siècle, la théorie des groupes a pris une extension énorme, et ses applications à la mécanique quantique et à la théorie des particules élémentaires se sont développées tout au long du 20ème siècle.

Dans une lettre de 1877 au mathématicien Adolph Mayer, Sophus Lie écrit qu'il a crée la théorie des groupes en janvier 1873. Il s'agit bien sûr des groupes qu'il appelait "groupes continus" et qui sont appelés aujourd'hui "groupes de Lie". Lie cherchait à étendre l'usage des groupes du domaine des équations algébriques, où Galois les avait introduits, à celui des équations différentielles.

Dès 1871, la notion de générateur infinitésimal d'un groupe à un paramètre de transformations était apparue dans son oeuvre. C'est l'ensemble des générateurs infinitésimaux des sous-groupes à un paramètre d'un groupe continu qui forme ce que nous appelons aujourd'hui une algèbre de Lie.

Ce furent Wigner et Weyl qui montrèrent le rôle prééminent de la théorie des groupes, et de leurs représentations en particulier, dans la nouvelle mécanique quantique que développaient Heisenberg et Dirac. L'idée générale de la théorie des représentations est d'essayer d'étudier un groupe en le faisant agir sur un espace vectoriel de manière linéaire : nous essayons ainsi de voir le groupe comme un groupe de matrices (d'où le terme "représentation"). Nous pouvons ainsi, à partir des propriétés relativement bien connues du groupe des automorphismes de l'espace vectoriel (cf. chapitre de Théorie des Ensembles), arriver à déduire quelques propriétés du groupe qui nous intéressait.

Nous pouvons considérer la théorie des représentations de groupes comme une vaste généralisation de l'analyse de Fourier. Son développement est continu et elle a, depuis le milieu du 20ème siècle, des application innombrables en géométrie différentielle, en théorie ergodique, en théorie des probabilités, en théorie des nombres, dans la théorie des formes automorphes, dans celle des systèmes dynamiques ainsi qu'en physique, chimie, biologie moléculaire et traitement du signal. À l'heure actuelle, des branches entières des mathématiques et de la physique en dépendent.

Avant de commencer, nous renvoyons le lecteur au chapitre traitant de la Théorie Des Ensembles pour qu'il se rappelle de la structure et des propriétés fondamentales qui constituent le groupe et également au chapitre d'Algèbre Linéaire (car nous en utiliseront quelques résultats).

GROUPES CYCLIQUES

Le groupe cyclique (dont la définition a déjà été vue dans le chapitre de Théorie des Ensembles) va nous servir de base dans le cadre de l'étude des groupes finis. Par ailleurs, plutôt que de faire des développements généralisés nous avons préféré prendre des exemples particuliers afin de présenter l'idée de groupe cyclique (approche plus adaptée à l'ingénieur).

Nous allons donc prendre l'exemple fort sympathique des heures de la montre... avec trois approches différentes qui successivement (!) permettront d'aborder un groupe cyclique simple.

- Première approche :

Imaginons donc une horloge avec une aiguille qui peut prendre 12 positions possibles (mais pas de positions intermédiaires).  Nous noterons de manière spéciale les 12 positions possibles: equation (le trait au-dessus des nombres n'est pas innocent!).

Rien ne nous empêche sur l'ensemble de ces positions de définir une addition, par exemple :

equation   (9.1)

ce qui est similaire aux résultats que nous obtenons lorsque dans notre quotidien nous faisons des calculs avec notre montre.

- Deuxième approche (première extension)

Si nous observons bien notre montre, nous remarquons qu'à chaque fois que nous rajoutons 12 (ou retirons...) à une valeur des heures de notre montre alors nous tombons sur un ensemble de nombres bien déterminé qui sont aussi dans equation. Ainsi (évidemment dans le cadre d'une montre seules les premières valeurs positives nous intéressent la plupart du temps mais ici nous faisons des maths alors nous généralisons un peu...) :

equation   (9.2)

Nous retrouvons ici un concept que nous avions déjà vu dans le chapitre de Théorie Des Nombres. Il s'agit de classes de congruences et l'ensemble des ces classes forment l'ensemble quotient equation. Si nous munissons cet ensemble quotient d'une loi d'addition, il est normalement facile d'observer que celle-ci est un interne à l'ensemble quotient, qu'elle est associative, qu'il existe un élément neutre  et chaque élément possède un symétrique (inverse).

Ainsi, cet ensemble quotient muni de uniquement de la loi d'addition (sinon en ajoutant la multiplication nous pouvons former un anneau) est un groupe commutatif.

- Troisième approche (deuxième et dernière extension) :

Voyons une troisième et dernière approche qui explique pourquoi le groupe quotient est cyclique.

Si nous projetons la rotation des aiguilles de notre montre dans equation et que nous définissons :

equation   (9.3)

Nous avons alors equation et :

equation   (9.4)

ce qui explique pourquoi le groupe quotient equation est appelé "groupe cyclique" (par isomorphisme de groupe selon ce qui a été vu en théorie des ensembles). Son isomorphe est noté equation.

Si nous représentons dans equation l'ensemble isomorphe equation nous obtenons alors sur le cercle unité un polygone ayant n sommets comme le montre la figure ci-dessous :

equation
  (9.5)

Par ailleurs, le nombre d'éléments composants equation étant fini, equation est fini. Contrairement au groupe equation qui est lui un groupe discret infini.

Ce concept de finitude sera peut-être plus évident avec l'exemple que nous ferons de suite après avec equation où le lecteur observera que cet ensemble a le même nombre d'éléments que equation.

Remarque: Les mathématiciens appellent equation le "groupe des racines n-èmes de l'unité". Une racine n-ème de l'unité (parfois appelée "nombre de De Moivre") est donc un nombre complexe dont la puissance n-ème vaut 1. Par ailleurs, pour un entier n donné, toutes les racines n-ème de l'unité sont situées sur le cercle unité et sont les sommets d'un polygone régulier à n côtés ayant un sommet d'affixe 1.

Ce qui intéresse les physiciens particulièrement dans un premier temps ce sont les représentations des groupes finis (aussi les groupes continus que nous verrons plus loin). Ainsi, la représentative de equation nous est connue puisque la rotation dans le plan complexe est donnée comme nous l'a montrée notre étude des complexes dans le chapitre sur les Nombres :

equation   (9.6)

avec equation. Cette représentatives est un sous-groupe du groupe des rotations O(2) sur lesquelles nous reviendrons plus loin. Le groupe des rotations du plan étant lui-même un sous-groupe du groupe linéaire GL(2) (nous en donnerons une définition précise et un exemple plus loin).

Au fait, les mathématiciens sont capables de démontrer que tous les groupes quotients equation sont cycliques à isomorphisme près avec equation. Les mathématiciens disent aussi que equation est un quotient fini du group monogène equation.

Cette approche est par contre peut-être un peu abstraite. Alors, si le lecteur se rappelle du chapitre de Théorie Des Ensembles nous avons vu une définition bien précise de ce qu'était la cyclicité d'un groupe : Un groupe G est dit cyclique si G est engendré par la puissance d'au moins un de ses élémentsequation appelé générateur tel que:

equation  (9.7)

Vérifions que ce soit bien le cas pour le groupe :

equation   (9.8)

qui constitue un cas scolaire.

Nous noterons les éléments qui constituent ce groupe:

equation   (9.9)

Ceci étant fait, il convient de faire attention que dans la définition ensembliste du groupe cyclique nous parlons de "puissance" si la loi interne du groupe est la multiplication mais si la loi interne est l'addition, nous avons alors :

equation   (9.10)

Le premier élément générateur du groupe :

equation   (9.11)

est l'élément 1. Effectivement :

equation   (9.12)

Le deuxième élément générateur du même groupe est 3 :

equation   (9.13)

Par contre, le lecteur pourra vérifier que 2 n'est pas générateur de ce groupe!

Au fait, en ce qui concerne les groupes equation les mathématiciens arrivent à démontrer que seules les éléments du groupe qui sont premiers avec n sont générateurs (c'est-à-dire les éléments dont le plus grand commun diviseur est 1).

Voilà pour notre introduction aux groupes cycliques. Passons maintenant à une autre catégorie des groupes.


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